J.O. 271 du 21 novembre 2002
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Texte paru au JORF/LD page 19264
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Décision n° 2002-2653/2718 du 14 novembre 2002
NOR : CSCX0206093S
Le Conseil constitutionnel,
Vu 1° la requête no 2002-2653 présentée par M. Olivier Taoumi, demeurant à Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault), enregistrée le 25 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 2e circonscription du département de l'Hérault pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu 2° la requête no 2002-2718 présentée par M. Christian Bouillé, demeurant à Montpellier (Hérault), enregistrée le 26 juin 2002 à la préfecture du département de l'Hérault et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;
Vu les mémoires en défense présentés par M. Jacques Domergue, député, enregistrés au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 30 août 2002 et le 6 novembre 2002 ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. Bouillé, enregistré comme ci-dessus le 9 septembre 2002 ;
Vu les mémoires complémentaires présentés par M. Taoumi, enregistrés comme ci-dessus le 18 septembre 2002 et le 31 octobre 2002 ;
Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus les 11 octobre et 13 novembre 2002 ;
Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, en date du 26 septembre 2002, approuvant après réformation le compte de campagne de M. Domergue ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre la même élection ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les griefs relatifs à la campagne électorale :
En ce qui concerne les opérations du premier tour :
2. Considérant, en premier lieu, que le tract distribué par M. Domergue au cours de la dernière semaine du mois de mai 2002 se borne à reprendre des thèmes évoqués au plan national pendant la campagne électorale ; qu'eu égard à la date de sa diffusion, les autres candidats ont été en mesure d'y répondre en temps utile ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que, si l'article L. 49 du code électoral « interdit de distribuer ou faire distribuer, le jour du scrutin, des bulletins, circulaires et autres documents », cette interdiction ne s'applique pas aux distributions effectuées pendant les jours qui précèdent celui du scrutin ; que, par suite, M. Taoumi n'est pas fondé à soutenir que M. Domergue aurait commis une irrégularité en diffusant le 7 juin 2002, soit deux jours avant le scrutin, un document dont il n'est pas contesté qu'il s'agissait de sa profession de foi ;
4. Considérant, en troisième lieu, que, si, lors d'une réunion électorale en date du 7 juin 2002 à laquelle assistait une centaine de personnes, M. Domergue a présenté un montage de photographies de son adversaire du second tour, ni ce procédé, ni les propos tenus lors de cette réunion par le candidat élu n'ont pu, dans les circonstances de l'espèce, altérer les résultats de l'élection, acquise seulement au second tour le 16 juin 2002 ;
5. Considérant, enfin, que l'apposition d'affiches du candidat élu sur la vitrine de sa permanence n'a pas été de nature à altérer le résultat du scrutin ;
En ce qui concerne les opérations du second tour :
6. Considérant, en premier lieu, que M. Georges Frêche était en mesure de répondre en temps utile, avant le second tour de scrutin, à un tract de son adversaire diffusé plusieurs jours avant le premier tour et dont le contenu, relatif à l'un des principaux thèmes de la campagne électorale, n'excédait pas les limites admissibles de la polémique électorale ; que M. Taoumi ne peut dès lors soutenir que la distribution de ce tract aurait altéré la sincérité des résultats du scrutin ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. Domergue a adressé, le lundi 10 juin 2002, à trois cent cinq médecins ayant la qualité d'électeurs de la circonscription une lettre-circulaire rappelant les termes de l'accord conclu, sous l'impulsion du ministre de la santé, entre les organismes de sécurité sociale et les représentants des médecins généralistes, sur la revalorisation du tarif de la consultation ; que cette lettre mettait en valeur l'action du ministre de la santé pour « rétablir la confiance » entre les professionnels de santé et les responsables politiques ; qu'eu égard à son contenu, ladite lettre, qui reprenait l'un des thèmes de la campagne électorale au niveau national, ne peut être regardée comme ayant constitué une pression sur les électeurs caractérisant une manoeuvre de nature à fausser les résultats du scrutin ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'un tract et une affiche, portés à la connaissance du public l'avant-veille et la veille du scrutin, font état de la position prêtée à M. Frêche sur la question de la Palestine et reproduisent certaines déclarations de ce candidat ; qu'il n'est pas soutenu que lesdites déclarations seraient inexactes ; que, si leur rapprochement avec des images reproduisant des faits dramatiques survenus au Proche-Orient constitue, en l'espèce, un procédé blâmable, il résulte de l'instruction que la polémique née des positions de M. Frêche a été abordée à plusieurs reprises au cours de la campagne électorale ; que, dès lors, la diffusion, même tardive, de ces documents, dont il n'est pas établi qu'ils seraient imputables au candidat proclamé élu, ne peut être regardée comme ayant été de nature à altérer la sincérité des résultats du scrutin ;
Sur les griefs relatifs au compte de campagne de M. Domergue :
9. Considérant que, par la décision susvisée du 26 septembre 2002, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a approuvé après réformation le compte de campagne de M. Domergue ;
10. Considérant, en premier lieu, que la lettre-circulaire précitée a été expédiée par le centre hospitalier universitaire de Montpellier au sein duquel M. Domergue exerce son activité professionnelle ; que, si ce candidat a ainsi utilisé certains des moyens matériels de cet établissement public, il résulte de l'instruction qu'étant autorisé à exercer au sein de l'hôpital des activités privées, il lui verse des redevances en contrepartie de la faculté qui lui est reconnue de recourir, le cas échéant, à titre personnel, aux moyens de secrétariat mis à sa disposition ; que, par suite, la dépense exposée pour l'expédition de trois cent cinq lettres à des médecins, laquelle peut être, en l'espèce, imputée à ses frais de secrétariat privé, ne peut être regardée comme ayant été supportée par une personne morale ; que, dès lors, le grief tiré de la violation de l'article L. 52-8 du code électoral doit être écarté ;
11. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la lettre-circulaire envoyée par M. Domergue présente un caractère électoral ; que, si M. Taoumi soutient qu'en n'inscrivant pas à son compte le montant de la dépense ainsi exposée, ce candidat aurait méconnu les dispositions de l'article L. 52-12 du code électoral, il résulte de l'instruction que la commission a réformé pour ce motif le compte de campagne déposé par le candidat ; qu'à cet effet, elle a ajouté aux dépenses déclarées une somme représentative du coût de l'opération et aux recettes une somme de même montant, qualifiée par elle de concours en nature apporté par l'intéressé ; que c'est à bon droit que le compte a été ainsi réformé par la commission ; que, par suite, le grief doit être écarté ;
12. Considérant, enfin, que, si M. Taoumi invoque de nouveaux griefs relatifs au compte de campagne de M. Domergue, ils ont été soulevés pour la première fois dans des mémoires enregistrés après l'expiration du délai de dix jours suivant la proclamation des résultats fixé par l'article 33 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 ; que, dès lors, ils ne sont pas recevables ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de M. Taoumi et de M. Bouillé doivent être rejetées,
Décide :
Article 1
Les requêtes de M. Olivier Taoumi et de M. Christian Bouillé sont rejetées.Article 2
La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 novembre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.
Le président,
Yves Guéna